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AERéSP 28 (Accueil des Exilé-e-s et Régularisation des Sans Papier)
23 novembre 2007

Enfance et immigration : un conte de fous

jeudi 22 novembre 2007 - 10:23 societe Ce mois de novembre est celui des droits de l'enfant à Rennes. Et comme cette année est aussi celle de la très contestée loi Hortefeux et de l'ouverture du centre de rétention de Saint-Jacques, nous nous sommes penchés sur les droits des enfants immigrés ou nés de parents immigrés et notamment sans-papiers. L'espace réservé aux enfants au centre de rétention de Saint-Jacques-de-la-Lande. On entend souvent dire que dans notre société, l'enfant est roi. Peut-être... Ce serait presque à souhaiter en tous cas et pour l'Enfant, avec un grand « E ». Malheureusement on se rend compte que la réalité n'est pas la même pour tous. Immigrés, enfants d'immigrés, de parents sans-papiers, la royauté n'est pas pour vous. Un petit bout d'insouciance accroché aux barbelés Début août 2007, le tout nouveau centre de rétention de Saint-Jacques ouvrait ses portes aux sans-papiers. « Il peut accueillir 46 hommes, 12 femmes et 2 familles », nous expliquait-on à l'époque. Et qui dit familles, dit enfants. « Cinq ou six ont été retenus là-bas depuis l'ouverture », explique Jean-Claude, du Réseau éducation sans frontière. Les conditions d'accueil pour les enfants, ne seraient pas, selon lui, un vrai rêve bleu. « Il y a un médecin, une infirmière, mais pas de suivi en puériculture. Les gendarmes aussi d'ailleurs semblent très préoccupés par le fait de voir des enfants retenus. Les conditions de vie sont très spartiates. » Récemment justement, l'entrée au CRA d'un bébé de trois semaines a fait grand bruit. À tel point d'ailleurs que la cour d'appel de Rennes à jugé ce traitement « indigne et inhumain, comme nous l'explique Mélanie Le Verger, avocate spécialisée dans la défense des mineurs et des étrangers. Ce cas a fait jurisprudence et il ne pourra plus y avoir d'enfants de cet âge placés en rétention. Mais comment décider de l'âge minimum ? » Les centres de rétention sont les seuls endroits en France où il est autorisé de placer des enfants de moins de treize ans. L'intérêt de l'enfant ou du portefeuille ? Les enfants ne sont pas forcés de suivre leurs parents en rétention, « aucun texte d'ailleurs n'autorise à les retenir », mais on l'imagine, la séparation n'est parfois pas plus évidente. « Ironie ou cynisme ? On dit que c'est fait par humanisme. Ça se discute » pour RESF. Et si c'étaient les parents qu'on laissait avec les enfants et pas l'inverse ? « Ça peut arriver, explique Mélanie Le Verger, quand on considère qu'il y a une bonne intégration de l'enfant, on laisse parfois les parents sur le territoire. » Pour l'avocate, la vraie arme secrète est l'article 3-1 de la Convention de New-York relative aux droits de l'enfant : Dans toute décision de justice, l'intérêt de l'enfant doit primer. Pour Jean-Claude, la lecture est toute autre : « L'expulsion peut aussi être considérée comme une disproportion par rapport au trouble que représente la famille. Une expulsion coûte plusieurs milliers d'euros. Pour une personne il faut trois billets, avec les deux policiers qui l'accompagnent. Pour une famille il faut parfois un avion militaire et trois ou quatre policiers. » Direction la sortie L'expulsion justement, parlons-en. « Un enfant mineur en situation isolée ne peut pas être reconduit à la frontière, qu'il soit né ou non sur le territoire, rassure l'avocate. Mais si les parents le sont, il devra suivre. » Seule manière pour l'enfant d'influer sur le départ de la famille : rester introuvable. Au nom de l'unité familiale, on ne sépare pas un enfant de ses parents. « On en a beaucoup parlé, notamment à Brest où le comité de soutien à la famille cachait tour à tour les enfants pour éviter l'expulsion de toute la famille. » Quoi qu'il en soit, rétention ou non, la chasse aux sans-papiers ne peut que laisser de vilaines séquelles aux enfants, et on peut craindre aujourd'hui, avec la loi Hortefeux, que les choses ne se détériorent encore un peu plus. Et avec tout ça... « Évidemment qu'ils n'ont pas les mêmes droits, s'insurge Jean-Claude. Avec la loi Hortefeux par exemple, pour avoir droit au regroupement familial, un immigré doit gagner entre un smic et un smic et demi (NDLR : entre 1280 et 1530 euros brut). On ne demande pas ces garanties à une famille française. Il leur faut aussi justifier d'un appartement de taille suffisante et je ne parle pas des tests ADN... » Quant à notre avocate, elle semble avoir sur le coeur bien des choses à dire à ce sujet. Elle nous expose le cas d'un enfant d'origine étrangère, malade. « Avant juillet 2006, les deux parents pouvaient bénéficier d'une carte de séjour d'un an pour rester à ses côtés. Aujourd'hui c'est seulement l'un des deux et pour une durée de six mois. » Aucune possibilité de travailler légalement avec ce titre de séjour, qui n'ouvre pas non plus de droits aux prestations familiales. « Et les tests osseux, continue-t-elle. Lorsqu'un mineur isolé arrive en France et qu'il y a un doute sur son âge, on lui fait un test osseux fondé sur une étude réalisée au début du siècle dernier, sur des occidentaux. Évidemment ils sont reconnus majeurs et donc expulsables. » Un test dont la fiabilité est d'ailleurs de plus en plus remise en cause par le monde médical. On l'aura compris, l'âge de l'insouciance est souvent teinté de gris pour ces enfants. Cette réalité n'est évidemment pas celle de tous les enfants d'immigrés, mais la situation se complique gravement lorsqu'elle n'est pas régularisée. Et les choses, malheureusement, ne semblent pas aller en s'améliorant. Sabrina KHENFER
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